Le scénario montré dans la vidéo n’est qu’un concept futuriste montré par l’auteur et non la vidéo d’une installation existante. Les noms des pays mentionnés dans la vidéo ne le sont qu’à titre indicatif. Cela ne signifie donc pas que ces pays ont créé des usines pour fabriquer des bébés humains.
Une vidéo, diffusée dans des groupes sur WhatsApp, laisse croire que certains pays ont commencé à fabriquer des “enfants humains” en “usine”.
D’une durée de 2 min 20 secondes, la vidéo qui est parvenue à l’équipe de la rédaction de Togocheck et FGI-Bénin, est accompagnée du commentaire : « C’est fini l’humanité a atteint la ligne rouge à ne pas franchir. Les japonais et coréens l’ont franchi – Une usine de production d’enfants humains – Que nous réserve l’avenir ? – L’usine peut produire jusqu’à 30.000 Bébés par an. an. 🤔🤔 »
En suivant le lien YouTube fourni à la fin de la vidéo, on se rend compte que la vidéo n’y est plus disponible. Mais, grâce à une recherche inversée d’images nous avons pu remonter à la vidéo originale. Elle a été mise en ligne par Hashem Al-Ghaili, le 9 décembre 2022 et au 25 janvier 2023, elle a été vue 1 960 302 fois. Il s’agit d’une animation vidéo d’une durée de 8 minutes 39 secondes, et doublée avec une voix (off) féminine qui fournit les explications en anglais. Aucun humain n’est d’ailleurs visible dans la vidéo.
Une recherche avec les mots clés (Usine de production d’enfants humains Japon Corée), montre que la même vidéo de Hashem Al-Ghaili a été tronquée et publiée par différents comptes sur YouTube (ici, ici) et sur Facebook (ici). D’après les publications de ces vidéos, les Japonais et les Coréens auraient créé une usine de fabrication de bébés humains.
Et pourtant, d’après les recoupements, d’une part, il n’existe à ce jour aucune preuve que la Corée et le Japon aient créé des usines de fabrication de bébés humains, même si mention a été faite de leur nom (ndlr : Japon- Bulgarie-Corée du Sud) dans la vidéo. D’autre part, la vidéo en question n’a aucun lien, ni avec la Corée, ni avec le Japon.
Il s’agit plutôt d’une vidéo d’animation éditée par un réalisateur yéménite (basé en Allemagne), pour présenter un concept futuriste de procréation humaine assistée par l’intelligence artificielle et qui n’existe pas encore.
Ectolife : uniquement un concept
Les recherches indiquent qu’EctoLife est un concept qui propose aux parents de « produire » des bébés personnalisés à l’aide d’utérus artificiels. D’après la vidéo, il s’agit de la première installation du genre, alimentée par des énergies renouvelables, composées d’énergie solaire et éolienne, où 30 000 bébés peuvent grandir dans un délai d’un an. Toujours selon la vidéo, Ectolife dispose de 75 laboratoires dont chacun a la capacité de recevoir jusqu’à 400 utérus artificiels. L’établissement utilise l’intelligence artificielle pour surveiller et répondre à la croissance de chaque bébé.
Cette vidéo est l’initiative de Hashem Al-Ghaili qui est d’ailleurs le publicateur initial de la vidéo. Sur YouTube où la vidéo a été publiée, il indique que son compte « (…) vise à partager des contenus vidéo sur la science et la technologie, dont certains sont autoproduits (…) ». Basé à Berlin, Hashem Al-Ghaili se présente comme un producteur, un réalisateur et un communicant scientifique, mais aussi comme “biologiste moléculaire de métier”, selon son site Web. Très prolifique avec des centaines de vidéos publiées sur YouTube et cumulant plus de 89 millions de vues, il est également lauréat de prix pour ses productions.
D’après le magazine français, Futura-Sciences, l’auteur de cette vidéo « (…) a donc une approche marketing du futur et non pas scientifique (…) Et avec EctoLife, un projet qu’il a révélé en avant-première à Science and Stuff, il a réussi son coup. »
L’idée cachée derrière Ectolife est de mettre fin aux naissances prématurées et aux césariennes. Hashem dit qu’il offre également une solution pour les femmes qui ont eu leur utérus enlevé chirurgicalement en raison d’un cancer ou d’autres complications. Cela pourrait également aider les pays qui souffrent d’un grave déclin démographique, notamment le Japon, la Bulgarie, la Corée du Sud et bien d’autres, rapporte le site d’information Les Nouvelles (ici)
D’après les spécialistes, même si le concept n’est pas totalement irréalisable, les réglementations éthiques dans plusieurs pays interdisent certaines expérimentations sur les humains (ici, ici, ici). Par ailleurs, il faut noter qu’il existe déjà des incubateurs qui permettent de garder en vie des bébés nés prématurément, ou encore des dispositifs qui ont déjà été expérimentés, notamment chez les animaux (1, 2, 3).
Interrogé sur la probabilité de réalisation de ce concept, Andrew Shennan, professeur d’obstétrique au King’s College de Londres, a déclaré au HuffPost que « D’un point de vue théorique, c’est possible. C’est juste une question de fournir un environnement correct avec du carburant et de l’oxygène et je pense que les technologies sont là pour être en mesure d’y parvenir (…) Il y a beaucoup d’exemples où les bébés sortent extrêmement tôt et sont très bien soignés dans des incubateurs, ce qui est une forme très naïve de ce dont vous parlez, et ils sont nourris par des tubes jusqu’à leur estomac. »
Par ailleurs, Hashem Al Ghaili a animé une vidéo en direct le 21 décembre 2022 sur sa page Facebook pour lever les confusions sur le sujet. Dans cette vidéo, il a affirmé qu’Ectolife n’est qu’une imagination du futur basée sur ses connaissances scientifiques. Toutefois, il pense tout comme certains experts que les installations d’utérus artificiel pourraient devenir une réalité dans une dizaine d’années si les restrictions éthiques sont supprimées.
En définitive,
Sur la base des recoupements (ici, ici), nous sommes parvenus à la conclusion que le scénario montré dans la vidéo n’est qu’un concept futuriste montré par l’auteur et non la vidéo d’une installation existante. Les noms des pays mentionnés dans la vidéo ne le sont qu’à titre indicatif. Cela ne signifie donc pas que ces pays ont créé des usines pour fabriquer des bébés humains.
Article produit conjointement par Togocheck et FGI-Bénin, avec le soutien de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) dans le cadre d’un projet de jumelage entre initiatives francophones dans la lutte contre la désinformation.