Le Cameroun amorce une transformation industrielle ambitieuse, adossée à l’exploitation stratégique de ses ressources minières et à l’innovation technologique locale. C’est ce qu’a révélé, Pr FUH Calistus Gentry, ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique par intérim le 1er juillet 2025 à Yaoundé, lors de sa déclaration très attendue à la 14e édition du Salon de l’Action Gouvernementale (SAGO).
Avec une vision axée sur le développement des chaînes de valeur intégrées, le membre du gouvernement a souligné que le Cameroun est désormais prêt à transformer ses richesses naturelles sur place, grâce à une combinaison de volontarisme politique, de ressources naturelles abondantes et d’un positionnement géographique stratégique.
Des projets concrets en cours de matérialisation
Dans le domaine minier, le ministre a annoncé le lancement imminent du projet « Grands zambi », dont les tests opérationnels sont prévus pour le 12 juillet. Un autre projet de grande envergure, centré sur l’exploitation de la bauxite à Mini-Matap, démarre le 15 juiellet prochain avec huit volets structurants, notamment l’extension du réseau ferroviaire pour acheminer plus d’un million de tonnes de minerai vers le port de Douala. « La mine est prête, les locomotives et wagons sont acquis, et l’espace portuaire d’accueil est opérationnel », a précisé le ministre.
Il a également salué les progrès de l’entreprise Kodas, qui est passée de 4 kg à 60 kg de production mensuelle grâce à l’implémentation d’une technologie éprouvée, preuve que les partenaires industriels croient dans la vision camerounaise.
Vers la transformation locale des ressources
L’un des axes majeurs de cette stratégie est la transformation locale des matières premières, notamment le fer, l’aluminium et l’argile. Le ministre a affirmé que le Cameroun allait produire localement non seulement des lingots de fer enrichi, mais également des carreaux de grande qualité à base d’argile camerounaise.
Profitant des perturbations de la chaîne d’approvisionnement mondiale notamment celles causées par la guerre en Ukraine, le pays a su capter des marchés jadis desservis par l’Italie. Des villes spécialisées dans la production de carreaux, à l’instar de Kadei et Kribi, émergent déjà, avec l’objectif de faire du Cameroun le premier exportateur de carreaux en Afrique.
L’innovation au cœur du développement industriel
Le ministre a également insisté sur la relance des Journées technologiques, vitrines des talents camerounais dans les domaines de l’innovation et de l’ingénierie. Grâce à des partenariats avec des fonds africains, les jeunes porteurs de projets innovants bénéficient désormais d’un appui structuré.
« Nous devons penser, inventer et innover ici. Ce sont nos idées qui bâtiront notre industrie », a-t-il martelé devant un public conquis.
L’indication géographique : un levier économique sous-exploité
Autre pilier de la stratégie industrielle présentée : l’exploitation des indications géographiques protégées (IGP). Le Cameroun se distingue comme leader africain en la matière, avec trois IGP reconnues au niveau mondial : le cacao rouge, le poivre de Penja et le miel d’Oku.
Ces produits, prisés dans les marchés internationaux, génèrent des retombées économiques significatives. « C’est ce qui explique, entre autres, la hausse des prix du cacao rouge camerounais, utilisé dans les mélanges haut de gamme. Nous créons de la valeur, nous imposons des standards », a expliqué le ministre.
Une vision régionale, une ambition continentale
Grâce à sa position géographique stratégique et à son intégration dans la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), le Cameroun veut désormais devenir l’usine de transformation de l’Afrique centrale, en exportant vers un marché régional de plus de 300 millions de consommateurs au Nigéria voisin.
Le ministre a conclu en rendant hommage au président de la République pour son engagement dans le « vivre-ensemble » et le soutien à l’industrialisation inclusive, affirmant que le brassage culturel camerounais « crée un génotype productif exceptionnel », que l’on retrouve aussi bien dans le sport, la cuisine que dans la créativité industrielle.
Avec cette stratégie industrielle fondée sur les chaînes de valeur, l’innovation locale et les indications géographiques, le Cameroun entend écrire une nouvelle page de son histoire économique résolument tournée vers l’industrialisation souveraine et durable.
Martin Donald Ngane
